La galette de blé noir ou de sarrasin est devenue, au cours du dernier demi-siècle, une spécialité à part entière de Haute Bretagne: ainsi, à Rennes et dans sa région, des myriades de crêperies y célèbrent ce disque de farine de blé noir, d’eau et de sel, d’une trentaine à une quarantaine de centimètres de diamètre, de couleur plus ou moins grise, à la texture alvéolée, souple et humide, et au goût aigrelet. On distingue cette galette de blé noir de la crêpe de Basse Bretagne (crêpe bretonne), faite le plus souvent de froment, lait et œufs, d’apparence blonde, fine et croustillante.
Cependant, galette ou crêpe relèvent de la même technique, des mêmes outils : toutes deux réclament pour leur cuisson une galétière («tuile» pour les Gallos de Haute Bretagne, billig pour les bretonnants de Basse Bretagne), chauffée et graissée entre chaque louche. Un râteau de bois («rouable» en Haute-Bretagne, rozell en Basse Bretagne) permet d’étendre la pâte, que l’on retourne avec une spatule (le viroué gallo, le spanell bretonnant). Cette galette, roulée ou pliée (en carré, en rectangle, en triangle ou en portefeuille), fourrée de d’ingrédients variés qui en font un repas complet à elle seule, s’accompagne d’une bolée de cidre. Si les cartes des crêperies rivalisent en audace, certaines galettes traditionnelles se maintiennent en haut du palmarès: en particulier, la «complète», la miroir, la forestière...
Un peu d'histoire
Jadis les crêpes au blé noir composaient l’alimentation de base de la semaine. Elles se cuisaient à la poêle dans la cheminée, sur une seule face. On les coupait en fines lanières pour agrémenter les soupes, ou simplement beurrées ou avec du lait ribot. On les mangeait plus particulièrement le vendredi. Dans la rue, les marchandes de galette faisaient partie du folklore. Lors des fêtes, on s’en régalait encore plus que de coutume. C’est toujours le cas, aujourd’hui, lors des fest-noz, pardons, foires, kermesses, manifestations sportives…
Dans une crêperie, ou à l'occasion de la chandeleur, un «repas-crêpes» commencera par une ou deux galette(s) de blé noir garnie(s) et se terminera par une crêpe sucrée. Le tout, tradition oblige, arrosé de cidre!
La culture du blé noir* fut une bénédiction pour l'Armorique (son essor date du XVI ième siècle, bien que l'on retrouve des traces de pollen de sarrasin dans les tourbières de la région datées du XII ième siècle) poussant sur les terres ingrates où le blé ne voulait pas prendre. Dès la fin du XIX ième siècle, se produisit une première émigration bretonne sur Paris (fuyant la surpopulation et l'insuffisance des terres agricoles exploitables). Une seconde émigration, encore plus massive que la précédente, se produira dans la première moitié du XIX ième siècle, et même après la dernière guerre mondiale. Les crêperies se mirent à y fleurir, en particulier dans le quartier Montparnasse (comme on peut toujours le constater)... et par ricochet dans d'autres villes françaises et dans le monde.
Depuis ces deux dernières décennies, les galettes de sarrasin sont parties à la conquête des rayonnages des supermarchés de l’Hexagone, emballées sous cellophane. On en trouve également des garnies ainsi que des surgelées.
*Une plante et non une céréale.
Recette
Ingrédients
(pour 6 galettes de 30 cm de diamètre)
175 g de farine de blé noir
37 cl d'eau
5 g de gros sel (type Guérande)
Huile
Préparation de recette
Placer la farine et le sel dans un saladier. Y verser progressivement, l’eau en mélangeant à la cuillère de bois jusqu’à obtenir une pâte consistante et fluide. Rajouter 2 ou 3 cl d’eau si elle vous parait trop épaisse. Battre longuement pour l’aérer. Laisser reposer 2 heures au réfrigérateur.
Faire chauffer la galétière en la graissant avec de l’huile. Étaler une fine couche de pâte sur celle-ci. Attendre que celle-ci colore un peu avant de la décoller et laisser cuire encore une petite minute. Dans le cadre d'une galette à garnir: étaler la pâte, retourner à mi-cuisson pour faire dorer la seconde face de la galette tout en déposant la garniture choisie. Exemple: voir à forestière ou à galette à la fondue de poireaux.
Le p'tit truc de Léna
Si on ne dispose pas de galétière, une poêle large (surtout, dont le fond n'attache pas) fera tout aussi bien l'affaire.